Opérations sur les variables aléatoires
Dans toute cette partie, on se place dans un univers fini \Omega et on considère deux variables aléatoires X et Y définies sur cet univers.
Définition (Somme de variables aléatoires)
Si la variable aléatoire X prend les valeurs x_i (avec 1 \leqslant i \leqslant n) et si la variable aléatoire Y prend les valeurs y_j (avec 1 \leqslant j \leqslant m), la variable aléatoire X+Y est la valeur aléatoire :
qui prend toutes les valeurs possibles de x_i+y_j pour 1 \leqslant i \leqslant n et 1 \leqslant j \leqslant m
telle que la probabilité p(X+Y=s) est la somme des probabilités de tous les événements (X =x_i) \cap (Y =y_j) pour lesquels x_i+y_j=s.
Exemple
On lance deux pièces de monnaie parfaitement équilibrées et on considère les variables aléatoires :
X qui prend la valeur 0 si la première pièce tombe sur Pile et la valeur 1 si la pièce tombe sur Face
Y qui prend la valeur 1 si la première pièce tombe sur Pile et la valeur 2 si la pièce tombe sur Face
La variable aléatoire X+Y peut alors prendre les valeurs 0+1=1, 0+2= 1+1=2 et 1+2 = 3.
Les probabilités sont : p(X+Y=1) = p((X=0) \cap (Y=1)) \phantom{p(X+Y=1)}= \dfrac{ 1 }{ 4 } si les lancers sont indépendants.
p(X+Y=2) = p((X=0) \cap (Y=2)) + p((X=2) \cap (Y=1))
\phantom{p(X+Y=1)}= \dfrac{ 1 }{ 4 } + \dfrac{ 1 }{ 4 } =\dfrac{ 1 }{ 2 } si les lancers sont indépendants.
p(X+Y=3) = p((X=1) \cap (Y=2)) \phantom{p(X+Y=1)}= \dfrac{ 1 }{ 4 } si les lancers sont indépendants.
Définition (Produit par un réel)
Soit a et b deux nombres réels et X la variable aléatoire qui prend les valeurs x_i (pour 1 \leqslant i \leqslant n).
La variable aléatoire Z= aX + b est la variable aléatoire qui prend les valeurs z_i = ax_i + b avec les probabilités p( Z = z_i) = p(X=x_i)
Exemple
On lance un dé à 6 faces non truqué. On note X la variable aléatoire qui donne le résultat du dé. La loi de probabilité de X est donnée par le tableau :
x_i | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 |
---|---|---|---|---|---|---|
p(X=x_i) | \dfrac{ 1 }{ 6 } | \dfrac{ 1 }{ 6 } | \dfrac{ 1 }{ 6 } | \dfrac{ 1 }{ 6 } | \dfrac{ 1 }{ 6 } | \dfrac{ 1 }{ 6 } |
La variable aléatoire Z=2X + 1 fait correspondre à chaque lancer le double du résultat du dé augmenté de 1 ; sa loi est la suivante :
z_i | 3 | 5 | 7 | 9 | 11 | 13 |
---|---|---|---|---|---|---|
p(Z=z_i) | \dfrac{ 1 }{ 6 } | \dfrac{ 1 }{ 6 } | \dfrac{ 1 }{ 6 } | \dfrac{ 1 }{ 6 } | \dfrac{ 1 }{ 6 } | \dfrac{ 1 }{ 6 } |
Définition (Variables aléatoires indépendantes)
Soit X une variable aléatoire prenant les valeurs x_i (avec 1 \leqslant i \leqslant n) et Y une variable aléatoire prenant les valeurs y_j (avec 1 \leqslant j \leqslant m ).
On dit que les variables aléatoires X et Y sont indépendantes si et seulement si, pour tout i (1 \leqslant i \leqslant n) et tout j (1 \leqslant j \leqslant m), les événements (X=x_i) et (Y=y_j) sont indépendants.
Remarque
D’après la définition de l’indépendance vue en Première, cela signifie que pour tout i ( 1 \leqslant i \leqslant n) et tout j ( 1 \leqslant j \leqslant m):
p((X=x_i) \cap (Y=y_j)) = p((X=x_i) \times p(Y=y_j)
Propriété
Soient X et Y deux variables aléatoires définies sur \Omega et a un nombre réel, alors :
E(X+Y) = E(X)+E(Y)
E( aX+b ) = aE(X) +b
Exemples
Si l’on reprend le premier exemple (lancer de deux pièces), la loi de X est :
x_i 0 1 p(X=x_i) 0,5 0,5 La loi de Y est :
y_i 1 2 p(Y=y_i) 0,5 0,5 Et la loi de Z = X+Y est :
z_i 1 2 3 p(Z=z_i) 0,25 0,5 0,25 On a alors :
E(X) = 0 \times 0,5 + 1 \times 0,5 = 0,5
E(Y) = 1 \times 0,5 + 2 \times 0,5 = 1,5
et : E(X+Y) = 1 \times 0,25 + 2 \times 0,5 + 3 \times 0,25= 2
Par conséquent E(X+Y) = E(X)+E(Y).
Si l’on reprend le second exemple (lancer d’un dé), on a :
E(X) = 1 \times \dfrac{ 1 }{ 6 } + 2 \times \dfrac{ 1 }{ 6 } +\ 3 \times \dfrac{ 1 }{ 6 } + 4 \times \dfrac{ 1 }{ 6 } + 5 \times \dfrac{ 1 }{ 6 } \ + \ 6 \times \dfrac{ 1 }{ 6 } = 3,5
et : E(2X+1) = 3 \times \dfrac{ 1 }{ 6 } + 5 \times \dfrac{ 1 }{ 6 } + 7 \times \dfrac{ 1 }{ 6 } +\ 9 \times \dfrac{ 1 }{ 6 } + 11 \times \dfrac{ 1 }{ 6 } + 13 \times \dfrac{ 1 }{ 6 } = 8
Donc E(2X+1) = 2E(X)+1.
Propriété)
Soient X et Y deux variables aléatoires *indépendantes* définies sur \Omega :et a un nombre réel, alors :
V(X+Y) = V(X)+V(Y)
Soient X une variable aléatoire définie sur \Omega et a et b deux nombres réels, alors :
V( aX+b) = a^2 V(X)
Remarque
Comme l’écart-type \sigma est égal à la racine carrée de la variance on a (si X et Y sont *indépendantes*) :
\sigma (X+Y) = \sqrt{ \sigma (X) ^2+ \sigma (Y)^2 }
\sigma ( aX+b) = \left| a \right| \sigma (X)
Concentration – Loi des grands nombres
Définition
Un *échantillon* d’une loi de probabilité est une liste de variables aléatoires identiques et indépendantes X_1, X_2, \cdots , X_n qui suivent toutes cette loi.
Exemple
On réalise l’expérience qui consiste à tirer, au hasard, une boule d’un sac contenant cinq boules numérotées de 1 à 5 et on considère la variable aléatoire égale au numéro de la boule tirée.
Si on effectue n fois cette expérience (avec remise) et si l’on suppose les tirages indépendants, on crée un échantillon de n variables aléatoires suivant une loi uniforme sur l’ensemble \left\{ 1; 2; 3; 4; 5 \right\}.
Définition (Moyenne d’un échantillon)
Si X_1, X_2, \cdots , X_n est un échantillon d’une loi de probabilité, la *moyenne* (ou *moyene empirique)* de cet échantillon est la variable aléatoire définie par :
M_n = \dfrac{ X_1 + X_2 + \cdots +X_n }{ n }
Exemple
Par exemple on lance 60 fois un dé . On obtient 11 fois la face 6 . Le nombre moyen de 6 obtenus à chaque lancer est \dfrac{ 11 }{ 60 } (moyenne empirique) alors que l’espérance d’obtenir un 6 à un lancer est \dfrac{ 1 }{ 6}.
Propriété
Soit X_1, X_2, \cdots , X_n est un échantillon d’une loi de probabilité d’espérance \mu, de variance V et d’écart-type \sigma, alors, l’espérance mathématique, la variance et l’écart-type de la moyenne M_n sont :
\begin{aligned} E(M_n) &= \mu \\ \\ V(M_n) &= \dfrac{ V }{ n } \\ \\ \sigma (M_n) &= \dfrac{ \sigma }{ \sqrt{ n } } \\ \end{aligned}
Exemple
On reprend l’exemple du tirage d’une boule parmi six numérotées de 1 à 6.
Un calcul simple montre que, pour chaque tirage, l’espérance est \mu =3, la variance V=2 et l’écart-type \sigma = \sqrt{ 2 }.
Si l’on effectue n tirages et que l’on désigne par M_n la moyenne des numéros tirés, M_n suit une loi de paramètres :
E(M_n) = 3
V(M_n) = \dfrac{ 2 }{ n }
\sigma (M_n) = \sqrt{ \dfrac{ 2 }{ n } }
Remarque
On remarque que, quand la taille n de l’échantillon augmente, l’espérance mathématique de la moyenne ne change pas tandis que sa variance et son écart-type diminuent. Cette observation sera détaillée par la suite.
Propriété (Inégalité de Bienaymé-Tchebychev)
Soit X une variable aléatoire d’espérance mathématique \mu et d’écart-type \sigma.
Pour tout nombre réel \alpha strictement positif :
p( \left| X – \mu \right| \geqslant \alpha ) \leqslant \dfrac{ \sigma ^2 }{ \alpha ^2 }
Remarques
En posant \alpha = k\sigma, l’inégalité de Bienaymé-Tchebychev peut aussi s’écrire P(|X – \mu| \geqslant k\sigma) \leqslant \dfrac{1}{k^2}.
On rappelle que \left| X – \mu \right| représente la distance entre X et \mu.
Intuitivement, l’inégalité de Bienaymé-Tchebychev signifie donc que la probabilité que X prenne des valeurs éloignées de son espérance est faible (notamment si son écart-type est faible).
Exemple
L’espérance de gain à un jeu est de 10 euros et l’écart-type de 1 euro. On cherche à minorer la probabilité que le gain soit compris dans l’intervalle ] 5~;~15[ en utilisant l’inégalité de Bienaymé-Tchebychev.
Soit X la variable aléatoire représentant le gain. Ce gain est compris dans l’intervalle ] 5~;~15[ si et seulement si \left| X – 10 \right| < 5.
Or cet événement \left| X – 10 \right| < 5 est l’événement contraire de \left| X – 10 \right| \geqslant 5 et d’après l’inégalité de Bienaymé-Tchebychev :
p \left( \left| X – 10 \right| \geqslant 5 \right) \leqslant \dfrac{ 1 ^2 }{ 5 ^2 } = 0,04
Donc la probabilité que le gain soit compris dans l’intervalle ] 5~;~15[ est supérieure à 1 – 0,04 = 0,96.
Propriété (Inégalité de concentration)
Soit (X_1, X_2, \cdots , X_{n}) un échantillon d’une loi de probabilité d’espérance mathématique \mu et d’écart-type \sigma. On note M_n la moyenne empirique définie par M_n = \dfrac {X_1+X_2+ \cdots +X_n}{n}.
Pour tout réel strictement positif \varepsilon :
p\left( \left|M_{n} – \mu \right| \geqslant \varepsilon \right) \leqslant \dfrac{ \sigma ^2 }{ n \varepsilon ^2 }
Démonstration
On applique l’inégalité de Bienaymé-Tchebychev à M_n en tenant compte du fait que E(M_n) = \mu et \sigma (M_n) = \dfrac{ \sigma }{\sqrt{ n } }.
Propriété (Loi faible des grands nombres)
Soit (X_1, X_2, \cdots , X_{n}) un échantillon d’une loi de probabilité d’espérance mathématique \mu et de moyenne empirique M_n.
Alors, pour tout réel \varepsilon > 0 :
\lim\limits_{ n \rightarrow +\infty } p\left( \left|M_{n} – \mu \right| \geqslant \varepsilon \right)=0
Remarque
Le résultat précédent signifie que la probabilité que la moyenne empirique s’éloigne de l’espérance mathématique devient très faible pour les grands échantillons.